Le Kiosque, roman

Olga Grushin

Rivages

  • 6 novembre 2011

    Une attente marquante !

    Dés les premières pages, le lecteur est comme happé dans cet univers particulier, et il est lui aussi contraint de patienter pour connaître le dénouement de cette attente qui n’en finit pas. Comme ceux qui attendent, il s’attache à ces silhouettes rencontrées quotidiennement, à ces destins si dissemblables et pourtant tous tendus vers une promesse de bonheur. Au-delà de l’attente, se profile l’histoire touchante de cette famille branlante : Anna, qui fait la queue pour faire plaisir à sa mère, cette mère muette, fantôme hantant la maison dont le passé plane comme un halo diffus au-dessus des protagonistes, Sergueï, homme insatisfait tout prêt à se laisser charmer par d’autres femmes pour fuir son quotidien morose, et leur fils Alexander, jeune homme qui fréquente des milieux interlopes peu recommandables, et qui, lui aussi, rêve de changer sa vie.

    Le kiosque est une belle réflexion sur le temps, sur le bonheur, sur la vie qui passe en nous effleurant seulement quelquefois…

    « Le temps comme un ogre dévorant ses enfants, le temps comme le souffle de Dieu, le temps comme la formule tracée par la craie crissant entre les doigts du physicien, avec son halo de cheveux argentés. Et, pour la plupart d’entre nous, notre petit bout de chemin, bref, terne, aux virages de plus en plus sombres, les moments de bonheur étant le plus souvent les moments passés à espérer le bonheur, à espérer quelque chose de magique, de lumineux – peut-être le frôlement d’un minuscule miracle d’immortalité, un rayon de soleil préservé dans une larme d’ambre, la prière damnée que Faust adresse à l’instant : « Arrête-toi, tu es si beau ! » » (p. 279)

    Le récit est néanmoins un peu long !


  • 11 octobre 2011

    Selinsky revient au pays ! A l’annonce du retour d’exil du célèbre compositeur dissident pour un concert unique en URSS, une file se forme devant le kiosque où les places de son spectacle devraient être vendues. Pendant plus d'un an, jour après jour, les mêmes personnes, espérant l’ouverture de ce kiosque, se retrouvent autour de leur passion pour la musique et font peu à peu connaissance.

    On suit plus particulièrement Anna, Sergueï, leur fils Alexander et la mère d'Anna, pour qui l'attente au kiosque, commencée par hasard, va progressivement se muer en une fervente "quête", chaque membre se relayant dans la file. L'hypothétique vente de ce billet (il n'y aura que 300 places et un seul sera vendu par personne) devient à la fois source de conflits, d'envies et de rêves...

    Mais tout ne tourne pas seulement autour de cette famille, car c'est avant tout le quotidien des Moscovites (a priori) que l'on découvre dans une période trouble, après le Changement (non daté). La vente pouvant se réaliser à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit, c'est un système astucieux d'entraide qui s'instaure pour que chaque "famille" puisse décrocher le précieux sésame. On découvre alors les motivation de chacun pour ce concert et à qui sont destinés les billets.

    L'ouvrage, rondement mené, est captivant. A travers des souvenirs passés, l'instant présent et un avenir meilleur espéré par la plupart des personnages, on prend volontiers place, au fil des pages, dans cette file d'attente qui changera au fur et à mesure la vie des différents protagonistes.