Bac option amour Charles, Nathalie
EAN13
9782012006430
ISBN
978-2-01-200643-0
Éditeur
Hachette
Date de publication
Collection
Bibliothèque verte (1413)
Dimensions
18 x 17,6 cm
Poids
154 g
Langue
français
Fiches UNIMARC
S'identifier

Bac option amour Charles, Nathalie

De

Hachette

Bibliothèque verte

Indisponible

Autre version disponible

Nathalie Charles

Bac
option amour

imgpp

Couverture illustrée par Beb Deum - Conception graphique : Éric Palliet.

© Hachette Livre, 2001.

43, quai de Grenelle, 75015 Paris.

ISBN : 978-2-01-203005-3

Loi n° 49-956 du 16 juillet 1949
sur les publications destinées à la jeunesse

À mes collègues, à mes élèves.

1

MARIE À TOUT PRIX

« Michel, tu n'as pas oublié de mettre le champagne au frais ? demanda ma mère en se penchant à la fenêtre de la cuisine.

— Ne t'inquiète pas ! Pour l'occasion, j'ai choisi une bouteille de Veuve Clicquot !

— Veuve Clicquot ? ricanai-je. Drôle de nom pour fêter un mariage ! Tu n'as pas peur que ce soit de mauvais augure ?

— Très drôle, Ludo, très drôle ! bougonna mon père, qui, en bermuda et chemisette, installait le barbecue au milieu de la pelouse. Depuis ce matin, tu es d'une humeur exécrable ! La fin des vacances, je suppose... Libère la table et épargne-nous tes sarcasmes ! Il est déjà sept heures. »

Morose, je rassemblai les magazines éparpillés devant moi. Au sujet de mon humeur, papa avait raison. Mais, pour le reste, il se trompait. J'étais ravi que nous soyons rentrés la veille du Midi. J'aurais même voulu revenir plus tôt ! Je ne laissais aucune idylle sur les plages de Sainte-Maxime ! Mon grand amour était ici, à Élanson. Et je le côtoyais depuis un an, sans le savoir. Telle était la révélation de ces deux mois d'été. L'image de Coralie, celle que jusqu'alors je ne considérais que comme une très bonne copine de classe, ne m'avait pas quitté d'une semelle lors de ces dernières semaines. Elle s'était allongée sur ma serviette de bain à la plage, elle avait dansé devant mes yeux dans les boîtes de nuit, elle s'était glissée sous mes paupières durant les nuits étouffantes. Et maintenant que je brûlais de rattraper le temps perdu, que je n'avais qu'une envie, lui faire comprendre la nature de mes sentiments, Coralie, la vraie, n'était pas disponible et me demandait de patienter quelques jours avant de la voir !

« Allez, mon grand, aide-moi à mettre le couvert ! me lança ma mère qui arrivait de la maison, portant un plateau chargé de vaisselle. Bob ne va pas tarder. C'est idiot, reprit-elle à l'intention de mon père, mais ça me fait tout drôle de penser qu'il va se marier !

— C'était pourtant prévisible ! répliqua celui-ci. Depuis deux ans qu'ils se fréquentent ! Je me réjouis que Marie fasse désormais partie de notre famille. Elle est charmante ! Et une agrégée d'histoire, quel honneur ! »

Maman se laissa tomber dans un fauteuil de jardin et ébouriffa ses courts cheveux noirs. Elle contempla les sandalettes dorées qui découvraient ses pieds bronzés aux ongles soigneusement laqués en rose et soupira.

« Tout de même, je n'aurais jamais imaginé qu'il lui demanderait sa main ! Leur situation paraissait leur convenir parfaitement ! Après tout, être voisin de palier quand on est amoureux, ça offre des avantages ! Ensemble chaque fois qu'on le désire, et chacun chez soi en cas de dispute !

— Mais rien ne prouve qu'ils ne continueront pas à vivre ainsi, une fois mariés ! rétorqua mon père, qui remuait avec précaution le charbon de bois incandescent du barbecue.

— S'ils se marient ! objectai-je, en disposant les assiettes sur la table. Marie a peut-être refusé.

— Ludo ! Comment peux-tu dire une chose pareille ? protesta ma mère, outrée. Ce n'est vraiment pas gentil !

— J'essaie juste d'être objectif ! Vous partez du principe qu'elle a accepté, alors qu'elle avait réclamé une semaine de réflexion avant de donner sa réponse ! Il faut s'attendre à tout ! Les femmes sont imprévisibles, ajoutaije, une pointe d'amertume dans la voix.

— Hum... Comme Coralie, je suppose ? » railla ma mère.

Mortifié par l'allusion, je préférai garder le silence. L'intuition de ma mère et son ouïe très fine, capable de capter les conversations téléphoniques les plus secrètes, rattrapaient largement la naïveté de papa. Elle avait dû surprendre mes coups de fil... La veille au soir, à peine mes bagages déballés, j'avais fiévreusement composé le numéro de Coralie pour lui proposer un rendez-vous le lendemain ; elle avait accepté, me propulsant dans les plus hautes sphères du bonheur. Mais ce matin, elle s'était brusquement décommandée, prétextant un voyage impromptu à Paris, chez une cousine. J'avais l'impression qu'une main assassine venait de me précipiter dans le vide. Si je ne passais qu'après sa famille, la tour Eiffel, les boutiques et les cafés de la capitale, mon histoire d'amour était finie avant même d'avoir commencé !

Évidemment, une telle mésaventure ne serait certainement jamais arrivée à Bob. Bob... Robert Lafontaine. Toujours sûr de lui, de l'aisance et du charme, qu'il soit en jean ou en costume... J'enviais sa peau mate, ses yeux noirs si profonds sous les sourcils broussailleux, ses traits réguliers... Coralie, qui l'avait croisé plusieurs fois à la maison, m'avait confié qu'elle le trouvait très beau. Le genre d'aveu dont je me serais bien passé ! Mais comment en vouloir à Bob ? Peut-on être jaloux d'un homme de soixante-cinq ans qui est votre grand-père ? Car même s'il avait toujours interdit aux membres de sa famille de l'appeler autrement que par son prénom, Bob était mon grand-père maternel. Après les longues années de solitude qui avaient suivi la mort de ma grand-mère, voilà qu'il devait enfin savoir si Mme veuve Marie Langlois, soixante et un ans, sa « fiancée » et voisine depuis deux ans, voulait bien l'épouser.

Le timbre aigrelet du portail d'entrée vint interrompre mes réflexions.

« Ah ! Nous allons être fixés ! » s'exclama mon père, un grand sourire aux lèvres.

Il se hâta d'aller ouvrir.

Le vantail de métal vert livra passage à la haute silhouette familière. Bob avait le chic pour éclipser tous ceux qui se trouvaient près de lui. Mais avec papa, la tâche était vraiment facile ! À cause de ses cheveux en moins et de ses kilos en trop, ce dernier prenait un sacré coup de vieux à côté de mon grand-père, qui arborait fièrement une chevelure encore drue et bouclée, délicatement argentée, et des abdominaux en pleine forme. De loin, on aurait pu leur donner le même âge, en dépit de la vingtaine d'années qui les séparait.

« Voilà les vacanciers de retour ! s'exclama Bob en nous embrassant. Quelles mines splendides ! Janis, ma chérie ! Tu as rajeuni ! Tu tiens de moi ! Alors, Ludo ? Tu as rencontré des sirènes sur la plage ? »

Malgré son ton enjoué, je sentis que quelque chose clochait... Intuition masculine, sans doute... Je lui trouvais le sourire figé, le regard fuyant. Nous nous installâmes autour de la table et il se mit à nous poser toutes sortes de questions sur notre séjour. Cet intérêt pour nos vacances renforça mes soupçons. Cherchait-il à gagner du temps ? Mes parents rongeaient leur frein, évoquant quelques anecdotes, mais maman, n'y tenant plus, interrompit brusquement le fastidieux compte rendu météorologique que mon père dressait du mois d'août.

« Alors ? Tu as vu Marie ?

— C'est vrai, racontez-nous ! renchérit papa en s'engouffrant dans la brèche. Que vous a-t-elle répondu ? »

Lentement, mon grand-père sortit son étui à cigares, alluma un ninas1 et s'éclaircit la voix.

« Eh bien, elle s'est montrée très touchée... Troublée, même... Elle accepte...

— Ah ! J'en étais sûr ! Félicitations ! l'interrompit son gendre.

— ... mais à une condition. »

Une guêpe égarée menaçait de s'introduire dans la bouche entrouverte de mon père.

« Comment cela ? Quelle condition ? » questionna ma mère, les yeux écarquillés.

En une fraction de seconde, je passai en revue toutes les hypothèses possibles. Que Bob cesse de participer au marathon annuel des seniors, qu'il arrête de parcourir des kilomètres à vélo, seul dans la campagne, à moins qu'il ne doive renoncer à sa partie de poker tous les après-midi aux Joyeux Lézards avec ses copains Gégé et Henri...

« Que j'accomplisse un exploit ! » laissa-t-il tomber.

Je n'en croyais pas mes oreilles.

« Quoi ? Toi ? Un exploit ? »

Maman procéda à une variation sur le même thème.

« Quoi ? Un exploit ? Toi ? »

Papa opta pour une conclusion sobre.

« Eh ben ! »

Un ange passa.

« Quelle idée saugrenue ! lança enfin ma mère en secouant la tête. Mais...
S'identifier pour envoyer des commentaires.

Autres contributions de...

Plus d'informations sur Nathalie Charles